Tchoukovski Korneï, L'insigne d'argent
Traduction du russe d'Odile Belkeddar
Illustrations en couleur de Philippe Dumas
Éditions l'école des loisirs, collection Medium, juin 2015
Présenté par la traductrice, Odile Belkeddar
L'insigne d'argent est un texte qui (re)donne de l'énergie ; il relate quelques mois dramatiques de la vie d'un adolescent en décrochage scolaire jusqu'à ce qu'il arrive à faire émerger en lui le désir d'apprendre.
Ce récit se passe dans un collège d'Odessa, aujourd'hui en Ukraine, qui dépendait alors de la Russie tsariste à la fin du 19ème s. mais le portrait de cet adolescent vif et moqueur, camouflant sous l'humour la douleur d'être un enfant sans père, reste totalement actuel et permet au lecteur d'aujourd'hui d'y trouver la distance nécessaire pour en voir éventuellement son double.
Un collégien facétieux se fait exclure et se voit retirer en public son insigne scolaire. Il va devoir trouver du travail, pour aider sa mère, qui l’élève en effet seule, et pourvoit difficilement aux besoins de deux enfants, comme blanchisseuse. Nous apprendrons que son exclusion reposait essentiellement sur une autre raison que sa seule impertinence, celle d'une loi visant à empêcher l'accès à l'enseignement supérieur aux enfants de milieu social ouvrier, mais l'enjeu essentiel du livre réside dans la constante humiliation que ressent l'adolescent qui ira jusqu'à fuguer et vivre un temps dans la rue avant de trouver le courage de rentrer chez lui.
Le récit est construit avec de multiples rebondissements entre les hésitations du narrateur à tout dire à sa mère, ses ruses pour faire changer d’avis le directeur…et ses tentatives poignantes d'inverser le destin. Les descriptions de son passage à vide, de sa lutte contre lui-même sont d'une rare franchise.
L’originalité de ce récit, écrit comme un feuilleton en 26 courts chapitres de 3 à 5 pages, tient aussi à la galerie des personnages, camarades d’école, professeurs et adultes de son entourage dont aucun n’échappe au sens du comique de l'auteur, si ce n'est celui de la mère, femme triste mais qui n'a peur de rien et n’hésitera pas à cacher un jeune adolescent voleur surpris en pleine nuit chez elle, lequel la « sauvera » plus tard à son tour de façon imprévue. Ce livre a tout pour être lu d'une traite tant le lecteur est mis en situation d'empathie et d'optimisme dynamique !
Ce récit, inédit en français, s’adresse aux lecteurs dès de 11 ans, mais échappe à la stricte catégorie d'un âge de lecture, et un adulte en appréciera également l'ancrage historique et littéraire.
Un dossier en fin de volume apporte quelques précisions sur les références et citations offertes par l'auteur.
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