Seyhmus DAGTEKIN, Sortir de l’abime, Manifeste
Le Castor Astral, 2018
ISBN 979-10-278-0151-0
4 €
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Sortir de l’abime… Publier, en 2018, un Manifeste poétique, il faut oser ! Mais quand vous aurez lu ce petit ouvrage coup de poing de Seyhmus Dagtekin, vous n’aurez qu’une envie, c’est de le relire et de l’offrir autour de vous.
L’auteur y revendique, par la poésie, la création, les mots, la capacité de résistance aux sujétions politiques, aux dominations économiques, aux inégalités sociales. Il nous engage à arrêter la course à la « soif de puissance, la « recherche effrénée de son devenir hors de soi ». La métaphore de la pyramide des pierres, le sommet ne supportant que d’être l’unique, développe cette phrase cinglante : « Le pouvoir n’accepte pas l’égalité. » C’est à chacun de prendre le pouvoir de création qui est à sa portée pour devenir une pierre à côté des autres, non en les dominant.
Le poète n’est pas celui qui crée pour se faire admirer, « mais, à l’inverse, il œuvre à une prise de conscience, à ce que chacun élargisse ses possibilités et puisse voler de ses propres ailes. » Face aux injustices, au mépris, au racisme, au sexisme, « la poésie est cette utopie, cet entêtement à ne pas se résigner devant l’injustice, à ne pas abdiquer face au pouvoir. »
Le conte de la mère de l’enfant boulimique rend son sens au langage et nous renvoie à nous-mêmes : « Sortir des postures du paraître et ne dire, ne donner à l’autre que ce qu’on a éprouvé dans son propre être. » La poésie est une utopie, une force de résistance à la disposition de chacun, par laquelle il peut amplifier sa force intérieure pour « ne jamais abdiquer devant qui que ce soit. »
Seyhmus Dagtekin, venu d’un village kurde de Turquie à vingt-deux ans, a publié plusieurs recueils de poésie au Castor Astral, dont Juste un pont sans feu. Dans son manifeste Sortir de l’abime, il revendique la poésie comme une utopie, « non plus une poésie dans les marges, dans les périphéries, mais une poésie au centre des choses, au cœur des êtres. » Faites connaitre ce manifeste autour de vous, il coute 4 € en librairie, un prix minime pour redonner à la création poétique sa place essentielle !
Viviane Youx
« Je n’ai jamais su comment eau se transformait en savoir,
en mémoire des savoirs
Et il a fallu fermer les yeux sur ce qu’on allait engloutir
Reliant de bouche en bouche notre avenir à notre passé
Si mal pensé
Pour prendre la suite de ce vieux sourcier qui avait enterré son bâton devant notre seuil
[…]
Si chacun pouvait parler à sa place, face à l’autre
Son immuable, même si l’on savait que tout mue autour de nous
Si chacun ne pouvait parler qu’à sa place
Ce que j’ai à dire passerait d’abord par moi
Pour se refléter où
Personne n’aurait à écouter personne
Personne ne serait nuage sur la tête de personne
Chacun chasserait de son propre soleil ses nuages »
Juste un pont sans feu, p. 83, Le Castor Astral 2007
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